Femmes 

 

Lesbiennes dans les mondes musulmans

 

" Au nom d'Allah, j'aime les femmes. " C'est une jeune femme, Sana, qui porte ce tee-shirt on ne peut plus explicite. Sous le titre " Suis-je encore musulmane ? " une bloggeuse exprime ses doutes : " Je crois en Dieu, mais quelquefois je me dis que je n'en ai pas le droit, l'islam condamne l'homosexualité, et les homosexuelles sont considérées comme des mécréants. " Ferda et Kiymet vivent ouvertement leur relation, elles vont ensemble à la mosquée d'Istanbul. En Iran, pays théocratique voisin de la Turquie, les lesbiennes et les gays sont persécutés au nom de l'islam. Le blog " Azriyas, lesbiennes et femmes libres ", créé par des femmes françaises d'origine algérienne, veut donner voix aux lesbiennes arabes et maghrébines : " Etre ou ne pas être, c'est le combat quotidien des lesbiennes arabes, maghrébines, là où elle vivent, en exil ou au pays natal pour faire entendre leur voix ! Cette voix que les sociétés arabes veulent étouffer. "
Il y a bien des mondes musulmans, car la pluralité des situations est frappante : pays où l'islam est majoritaire, familles musulmanes installées dans les pays occidentaux, enfants d'immigrés de 2ème ou 3ème génération. Les lesbiennes ont aussi des comportements différents vis-à-vis de la religion et de la culture musulmane : de la rupture totale avec l'islam au choix de l'abstinence homosexuelle au nom de l'islam.
Maryam est amoureuse de Maya, qu'elle rencontre régulièrement, mais elle voudrait ne plus avoir de relations charnelles avec Maya parce qu'elle considère que son amour pour elle est un péché. Des jeunes femmes d'origine maghrébine quittent leur banlieue parisienne pour se retrouver dans un bar du Marais : " C'est l'amour caché " lâche l'une d'elle ; sa copine raconte : " En Algérie, on m'ordonnait sans cesse de ne pas laisser les garçons me toucher et de rester en permanence avec les filles. J'ignorais encore que j'aimais les femmes alors qu'elles m'attiraient déjà. " Une autre confie : "J'ai divorcé au bout de deux ans. J'ai toujours su que j'aimais les femmes, et je l'ai dit un soir à une amie de la famille qui a fondu en larmes en m'avouant que son grand amour avait en fait été ma mère. " Elles affirment que bien souvent seuls leurs frères partagent leur secret et tolèrent leur choix ; ils préfèrent savoir leurs sœurs aux côtés d'une fille plutôt qu'au bras d'un garçon… 
Leïla, sur le blog Azriyas : " Très peu de femmes arabes ou berbères avouent leur homosexualité, préférant (une préférence au goût amer) d'autres parades ; certaines choisissent de ne pas choisir leur sexualité en contractant mariage (de plein gré ou contraintes et forcées) ou en survivant, puisqu'une partie d'elles s'en trouve niée, oblitérée…"
Irshad Manji, auteur de " Musulmane mais libre " a choisi ! Et malgré les menaces, elle continue le combat même si " on dit que je ne suis pas légitime parce que je suis lesbienne …parce que je suis une femme. "  Femme et lesbienne : en islam, la double peine ?

¤ Bernard Moreau
mars 2009