On dit... 

 

Identité : serons-nous sur la photo ?

 

Coucou, la revoilà ! A la veille des élections régionales (un hasard …), notre chère identité nationale fait un retour très remarqué. Madame, Monsieur, il va falloir nous dire pourquoi vous êtes fiers d'être Français (dixit M. Besson). Tout comme le Portugais serait fier d'être Portugais, et le Patagon fier d'être Patagon (ah non, pardon, la Patagonie n'est pas une nation). 
Ce débat lancé par le ministre de l'immigration et de l'identité nationale remet sur le tapis, qu'on le veuille ou non, les vieilles obsessions nationalistes. Identité : caractère de ce qui est identique (Larousse). En effet, il ne sera probablement pas question de définir un projet commun, un " faire ensemble ", mais de dresser le portrait-robot du français idéal, un " être semblable ". Et ceux qui ne sont pas assez ressemblants seront exclus. On adhère ou pas à un projet, c'est un choix ; on n'adhère pas à une identité.
Dans les pays où les nationalistes ont le vent en poupe, on connaît les droits - ou l'absence de droits - des homosexuels : en Europe centrale ou dans les pays de l'ex-URSS, quand les manifestations LGBT ne sont pas tout simplement interdites, ce sont les milices des partis nationalistes qui s'en chargent au nom des " valeurs nationales ". En Afrique, certains considèrent que l'homosexualité est " un mal " importé par les colonisateurs européens et définissent ainsi " l'identité africaine " comme exclusivement hétérosexuelle. Partout le discours homophobe fait constamment référence à une identité sexuée qui ne fait pas de place aux transgressions : on est homme ou femme, hétérosexuel. Il n'y a pas d'autre choix.
On mesure très vite à quoi peut servir l'élaboration de ce filtre identitaire, qui ne laisse passer que celles et ceux qui rentrent dans les normes préétablies. Le président de la République a déjà commencé, dans son discours de La Chapelle-en-Vercors, à dresser la liste des indésirables, en pointant du doigt - à travers quelques cas emblématiques - la population issue de l'immigration. Et pourquoi pas demain une identité française hétérosexuelle ? Pour un étranger pacsé à un français, c'est d'ailleurs déjà un peu le cas quand il ne peut pas demander le regroupement familial pour ses enfants restés au pays, ou obtenir la nationalité française : privilèges réservés au mariage hétérosexuel !
C'est la révolution française qui a dépénalisé l'homosexualité en 1791. Les législateurs de l'époque s'inspiraient largement des textes de Montesquieu qui écrivit : " Je suis nécessairement homme, et français par hasard … ".

¤ Bernard Moreau
décembre 2009