La première marche gay et lesbienne angevine a rencontré un succès dont ses organisateurs n'osaient rêver. 700 personnes ont défilé hier après-midi dans le centre d'Angers, pour mieux lutter contre l'homophobie.

700 personnes ont marché et dansé contre l'homophobie

Simples citoyens, associations, syndicalistes et partis politiques se sont retrouvés hier pour une grande fête de la tolérance.
Qui l'eût cru? Angers la prude a magistralement ouvert le bal des gay prides cette année. Des homos, des hétéros, des associations homosexuelles, les Verts, le Parti Socialiste et la CGT ont suivit char, camion et voiture composant le défilé, de la place Imbach au jardin du Mail, en passant par la rue d'Alsace et la rue Lenepveu. Yannick Taillandier, membre de Quazar, (l'association organisatrice), ne cachait pas sa satisfaction. « Réunir 700 personnes, c'est très bien. Comme nous passions par le centre ville, les gens auraient pu avoir peur d'être vus, pour leur boulot et tout ça. Mais non... ». Cette marche principalement axée contre l'homophobie a été un succès. Beaucoup de gens ont voulu en cette occasion bousculer les idées reçues. Effacer les préjugés. Comme Christine: « Evidemment, c'est plus facile de défiler à Nantes ou à Paris que dans sa ville, mais il faut oser être reconnu. Et ce qui est important, c'est que les familles soient là aussi. C'est bien également que le maire nous soutienne. Il représente la cité, tous les habitants sans exception ».
Tolérance
Festive, cette première Gay pride avait aussi l'ambition « d'éduquer », comme l'explique une femme venue soutenir son frère. « Mon frère est homosexuel. Je suis venue le rejoindre, et j'ai amené ma fille. Il faut expliquer aux enfants pour éviter l'intolérance ». Les participants, timides au départ de la place Imbach, se sont libérés à mesure qu'ils se comptaient, sans doute surpris et heureux d'être aussi nombreux. C'est en tout cas ce que signifiait un couple de jeunes filles: « nous étions venues l'année dernière à une manifestation place Saint Serge. Il n'y avait personne. Là c'est très bien, la police nous ouvre le passage, la municipalité nous soutient... ». Les « gogo dancers » sur leur char et les provocantes « Soeurs de la Perpétuelle Indulgence » ont su décoincer leur monde, à grands renforts de sifflets et de sono hurlante. La fête n'a pas mis longtemps à s'installer dans les rues, devant les Angevins amusés, surpris, voire un peu gênés, comme ce couple de personnes âgées: « Ils ont bien le droit de faire ça, ils sont libres, mais tout de même les croix catholiques dans les déguisements, ça nous gêne un peu ». Le cortège s'est immobilisé place du Ralliement, le temps de lancer slogans et confettis, avant de rejoindre le jardin du Mail. Là, la pluie a poussé chacun dans les parkings, où usagers et manifestants ont fait bon ménage.
Confettis et discours
L'averse passée, Stéphane Corbin, membre de l'organisation, a pris le micro pour un discours énergique. « Les gens qui nous excluent se trompent. Aujourd'hui, c'est l'occasion d'être visibles, et ça les ennuie que nous ayons la parole. Mais personne n'est tombé dans le piège du ghetto. Ici, il y a aussi des hétéros avec nous. Cette marche est un appel au civisme ».
« Qui pouvait prévoir un tel succès? »
s'est demandé avec bonheur un responsable de Quazar. Jean-Michel Marchand, député Vert de Saumur, en a profité pour évoquer les ratés et les emportements du débat sur le PaCS à l'Assemblée. Tout le monde y est allé de son commentaire, portant le plus largements possible une parole bienveillante. Des mots pour mieux accompagner une fête décidément placée sous les meilleurs auspices.

Le Courrier de l'Ouest, 29.05.2000