Angers a réussi sa Gay Pride

Environ 500 personnes ont participé, samedi à Angers, à la première Gay Pride organisée dans le département. Un chiffre qui a dépassé les espérances des organisateurs.

      Cheveux tout blancs mais yeux pétillants, elle tape des mains la petite dame au passage du cortège bruyant et coloré qui emprunte le boulevard Foch. « Je suis une grand-mère de 90 ans, j'ai quatre enfants. Je trouve ça très courageux ce qu'ils font. Ils payent des impôts comme les autres. Je préfère ça à un père qui viole ses enfants », explique-t-elle en regardant défiler les manifestants. « Moi, monsieur, je peux vous dire que les discriminations contre les homosexuels au travail, ça existe », ajoute, quelques mètres plus loin, une femme plus jeune qui attend l'autobus. Deux opinions qui résument bien le sentiment général, samedi après-midi à Angers, où se déroulait la première Lesbian et Gay Pride du département.
      Environ 500 personnes ont marché pendant une heure dans le centre-ville pour dénoncer « l'homophobie, fléau social ». Un chiffre qui a sensiblement dépassé les espérances des trois associations organisatrices, LGP Pays de Loire, Quazar et la Vache Folle. « On a tablé sur 300 personnes », indiquait juste avant le départ Stéphane Corbin, coordinateur de la manifestation. Il y avait des gens du Maine-et-Loire, mais aussi de Nantes, du Mans, de Laval et de Touraine. A titre de comparaison, la Gay Pride de Nantes, dont la sixième édition se déroulera le 10 juins, a attiré 1.600 personnes en 1999.
      Une Gay Pride ce doit être à la fois revendicative et festive, comme le rappelle Stéphane Corbin: « C'est une action de visibilité pour dire qu'on existe et qu'on doit être accepté par la population. Il y a de l'homophobie dans notre société. On n'accuse personne, c'est une réalité. Tous les citoyens indignés par toutes les formes de discrimination peuvent marcher avec nous. Une société n'est grande et forte que lorsqu'elle écoute les différences des minorités ».

Rendez-vous en 2001

      Celle d'Angers n'a pas dérogé à la règle. Les banderoles, les panonceaux, les slogans ne manquaient pas, certains volontiers provocateurs. « Une lesbienne à une réunion Tupperware, ça vous gêne? », « L'armée recrute des homos, et vous? », « Angers, sa cathédrale, ses tapisseries, ses lesbiennes » ; ou encore « Les Verts pédalent pour les homos », rappelant qu'une trentaine d'associations, de partis et de syndicats soutenaient cette première Gay Pride angevine.
      La fête, elle était également au rendez-vous. En ce samedi après-midi où il y avait foule en villes, les rues du centre ont connu une ambiance digne d'un carnaval. Musique techno poussée à fond, sifflets, jets de confettis, danseurs torse nu, déguisements et maquillages, rien ne manquait pour faire le spectacle.
      La pluie qui s'est mise à tomber avec force en fin de parcours n'a pas suffi à doucher les enthousiasmes. Sitôt l'averse terminée, les participants sont sortis du kiosque où ils avaient trouvé refuge pour prendre la parole. « Vous avez largement répondu à notre appel. J'espère que 2001 verra la 2ème LGP d'Angers. Nous demandons aujourd'hui que le système législatif puisse sanctionner les injures et discriminations dont nous sommes victimes », a déclaré Stéphane Corbin.
      Déguisés en religieuses ou en gentes dames du Moyen-Age, les représentants des « Soeurs de la perpétuelle indulgence » sont venus rappeler l'importance de la prévention dans la lutte contre le sida, une maladie que combat depuis plus de quinze ans cette association née aux Etats-Unis.
      Une preuve supplémentaire qu'on était pas là que pour faire la fête.

Jean-Charles STASI
La Nouvelle République, 29.05.2000